- Pitou a écrit:
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ça ne nous rajeunit pas...
Naissance du Gorille par Brassens.....
hoareaujeancharles@wanadoo.fr
Cher Georges
Comment t'es venue l'idée de la chanson du Gorille? Et aussi je voudrais savoir si tu as appris à jouer de la guitare tout seul? Et encore merci pour toutes tes chansons.
Georges Brassens
Bonjour,
Chaque chanson a son histoire, bien sûr. C'est mon ami André Sève, dans une biographie intitulée «Brassens, toute une vie pour la chanson», qui me rappelle que je lui avais confié: «J'ai composé mes premières chansons comme ça, en me promenant dans les rues de Paris. Le Gorille, par exemple. En courant les filles, en allant à un rendez-vous, je fignolais ma strophe». Et c'est exact. C'est au fil de mes flâneries que je ruminais un vers, que je recherchais le mot juste, la rime appropriée. Quitte bien sûr, à retravailler le tout, le crayon à la main, lors de mes studieuses matinées.
Cette chanson, achevée vers 1948, donc avant ma «vie publique», a des origines multiples et lointaines. Elle doit sûrement quelque chose à Rabelais, que j'admirais beaucoup depuis ma jeunesse. La genèse en remonte à 1943, à Basdorf. Retenus par le S.T.O., le service du travail obligatoire, cantonnés dans un camp de baraques, nous meublions nos soirées en improvisant des spectacles de variétés. J'avais pour la circonstance composé quelques chansons burlesques pour faire un peu rigoler les copains. L'une d'elles, «La ligne brisée», était devenue un chant de ralliement et avait bientôt été reprise dans toutes les baraques du camp. Quelques années plus tard, c'est en me rappelant ce succès que j'ai pensé retravailler la chanson. D'une farce outrancière, j'ai voulu faire une fable plus accessible. Mais à force de remaniements du texte originel il n'est plus rien resté sauf la locution devenue célèbre: «Gare au gorille», qui se trouvait déjà dans une version de cette gaudriole à géométrie variable. J'ai par contre conservé la découpe des vers et la musique, qui, malgré son ton monochrome de litanie sur deux accords de base, convenait bien au nouveau texte.
C'était les origines lointaines. Mais l'inspiration immédiate? Il apparaît évident qu'en y regardant de près, on retrouve dans cette chanson, qui est la première que j'ai enregistrée, la plupart des ingrédients qui vont jalonner mon oeuvre. Lorsque très jeune j'ai pensé faire des chansons, c'était avec la prétention de rehausser la barre et possiblement de communiquer un point de vue, une émotion. Mais la chanson engagée n'était plus du tout à la mode. Et de plus, par tempérament, j'ai toujours choisi de suggérer par métaphores interposées plutôt que de plaider ouvertement. Aussi, pour exprimer mon désaccord avec l'autorité, la machine judiciaire, la peine de mort, j'ai cherché une anecdote où je pourrais de plus insérer le fameux cri de mise en garde, le tout coloré de mon goût pour la tournure des chansons de salle de garde. Bien sûr, avec le recul, la charge peut paraître relever plus de la polissonnerie que du militantisme. Mais il faut se replonger dans le contexte de l'époque. Même telle qu'elle est connue aujourd'hui, la chanson n'a pas fait l'unanimité à sa sortie et a longtemps été boycottée par les programmeurs radio. Ce n'est qu'à la venue de Europe 1 qu'elle fut enfin diffusée.
Mais ce que peu de gens savent c'est que la chanson comportait à l'origine un couplet supplémentaire que, tout innocent qu'il paraisse aujourd'hui, j'ai dû moi-même me résoudre à élaguer. Jugez-en:
Nous terminerons cette histoire
Par un conseil aux chats-fourrés
Redoutant l'attaque notoire
Qu'un d'eux subit dans des fourrés:
Quand un singe fauteur d'opprob'e
Hante les rues de leur quartier
Ils n'ont qu'à retirer la robe
Ou mieux à changer de métier.
De plus, jugé trop agressif, on m'a même recommandé de changer le titre dont j'avais toujours doté la chanson: «Gorille vendetta».
La chanson a tout de même fait bonne route. On a très tôt établi un lien entre cet anthropoïde et le personnage quelque peu empêtré que le public découvrait sur scène à mes débuts. Si bien que pendant toute ma carrière mes levées de rideau étaient saluées aux accords de «gare au gorille». J'ai bien sûr un peu contribué moi-même à l'association d'images puisque lorsqu'un de mes chats ou de mes chiens se montrait délinquant ou même qu'un ami devenait un peu trop casse-pieds, il était vertement mis en garde d'un menaçant «gare au gorille!».
La guitare! C'est effectivement on ne peut plus seul que j'ai appris la guitare, tout comme j'ai appris la musique. Tout jeune, chez mes parents, j'ai reçu en cadeau un banjo sur lequel j'ai commis mes premières gammes. À cette époque, je ne ratais pas une occasion de me délier les doigts dès que je croisais un piano ou une guitare chez un parent ou un ami. À mon arrivée à Paris, j'eus la grande chance de loger chez une tante qui possédait un piano. L'amplitude de mon temps de loisir aidant, j'ai alors pu progresser à grands pas pour combler le fossé qui me séparait de mes idoles, Ray Ventura, et les jazz-men américains que nous commencions à découvrir. Pendant mon séjour aux «travaux forcés» en Allemagne, je retrouvai un piano irrémédiablement faux, mais c'était la guerre! De retour à Paris et dans la clandestinité chez Jeanne, je fus longtemps privé de tout instrument. C'est pourtant pendant cette période que j'ai produit plusieurs de mes premières chansons, recherchant la musique en tapant des mains sur le bord de ma table de travail, ou en imitant la trompette bouchée avec ma bouche.
La guerre terminée, ma première ambition fut de me précipiter aux puces pour m'offrir une guitare d'occasion, bien sûr médiocre. Ce n'est que plusieurs années plus tard, en 1951, qu'un ami, le chansonnier Jacques Grello, un des premiers à croire à mon talent, me «prêta» une guitare «dont il n'avait plus vraiment besoin».
Belle satisfaction de l'artisan qui a progressé consciencieusement et qui peut bientôt améliorer la qualité de ses outils, mes premiers cachets m'ont permis de commander une guitare, puis deux, qui correspondent à mes attentes. Jacques Favino, maître luthier remarquable, est devenu mon fournisseur attitré et j'eus bientôt le privilège qu'il fabrique formes et gabarits spécifiques pour la production de mes guitares personnelles.
Pour apaiser un peu le sentiment d'insécurité incontournable qui précède tout spectacle, j'ai toujours souhaité avoir dans ma loge deux guitares identiques. Qui plus est, par délicatesse pour mon public à qui je tenais à éviter la catastrophe de la corde qui cède et que l'on doit laborieusement remplacer, je changeais toutes les cordes de ma guitare à chaque récital. Je me souviens que lors de mon passage à Québec, en 1961, tout au long d'une semaine de représentations, un jeune homme empressé et que je sentais admiratif s'offrit à changer mes cordes, à accorder puis à «réchauffer» mes guitares. À peine un an plus tard, je fus étonné de voir la photo de cet inconnu sur les colonnes Wallace, l'affiche le proclamant en vedette à l'Olympia. C'était Gilles Vigneault, le grand poète québécois qui, modestement n'avait pas osé m'informer qu'il était nouvellement du métier.
Enfin, il est évident que la guitare est très intimement liée à mes chansons. Aussi plusieurs s'étonnent d'apprendre que, depuis très tôt, ce n'est pas à la guitare que je recherchais mes mélodies, que je travaillais mes musiques, mais bien à l'orgue électronique.
Salutations,
Le croque-notes
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"Gorille vendetta" ou plutôt "Le Gorille" est la première chanson qu'a enregistré Brassens...en 1953.
mais il l'avait écrite en 1943/44....donc il n'y a pas d'erreur...enfin si on se base à la naissance du gorille!
Le Gorille par Brassens, 9 couplets: il y en aurait eu 10 donc...
C'est à travers de larges grilles,
Que les femelles du canton,
Contemplaient un puissant gorille,
Sans souci du qu'en-dira-t-on.
Avec impudeur, ces commères
Lorgnaient même un endroit précis
Que, rigoureusement ma mère
M'a défendu de nommer ici...
Gare au gorille !...
Tout à coup la prison bien close
Où vivait le bel animal
S'ouvre, on n'sait pourquoi. Je suppose
Qu'on avait du la fermer mal.
Le singe, en sortant de sa cage
Dit "C'est aujourd'hui que j'le perds !"
Il parlait de son pucelage,
Vous aviez deviné, j'espère !
Gare au gorille !...
L'patron de la ménagerie
Criait, éperdu : "Nom de nom !
C'est assommant car le gorille
N'a jamais connu de guenon !"
Dès que la féminine engeance
Sut que le singe était puceau,
Au lieu de profiter de la chance,
Elle fit feu des deux fuseaux !
Gare au gorille !...
Celles là même qui, naguère,
Le couvaient d'un œil décidé,
Fuirent, prouvant qu'elles n'avaient guère
De la suite dans les idées ;
D'autant plus vaine était leur crainte,
Que le gorille est un luron
Supérieur à l'homme dans l'étreinte,
Bien des femmes vous le diront !
Gare au gorille !...
Tout le monde se précipite
Hors d'atteinte du singe en rut,
Sauf une vielle décrépite
Et un jeune juge en bois brut;
Voyant que toutes se dérobent,
Le quadrumane accéléra
Son dandinement vers les robes
De la vieille et du magistrat !
Gare au gorille !...
"Bah ! soupirait la centenaire,
Qu'on puisse encore me désirer,
Ce serait extraordinaire,
Et, pour tout dire, inespéré !" ;
Le juge pensait, impassible,
"Qu'on me prenne pour une guenon,
C'est complètement impossible..."
La suite lui prouva que non !
Gare au gorille !...
Supposez que l'un de vous puisse être,
Comme le singe, obligé de
Violer un juge ou une ancêtre,
Lequel choisirait-il des deux ?
Qu'une alternative pareille,
Un de ces quatres jours, m'échoie,
C'est, j'en suis convaincu, la vieille
Qui sera l'objet de mon choix !
Gare au gorille !...
Mais, par malheur, si le gorille
Aux jeux de l'amour vaut son prix,
On sait qu'en revanche il ne brille
Ni par le goût, ni par l'esprit.
Lors, au lieu d'opter pour la vieille,
Comme l'aurait fait n'importe qui,
Il saisit le juge à l'oreille
Et l'entraîna dans un maquis !
Gare au gorille !...
La suite serait délectable,
Malheureusement, je ne peux
Pas la dire, et c'est regrettable,
Ça nous aurait fait rire un peu ;
Car le juge, au moment suprême,
Criait : "Maman !", pleurait beaucoup,
Comme l'homme auquel, le jour même,
Il avait fait trancher le cou.
Gare au gorille !...
Et Francis a enlevé 3 couplets ....elle aurait été avec 9 couplets, elle m'aurait autant plu...
Gare au gorille gaaare...
j'adore....